Infos sur la Baie Missisquoi

Juin 2005 - Soirée « Eau citoyenne »

    À mes 22 000 concitoyennes et concitoyens du bassin versant de la baie Missisquoi qui n'ont pu assister à la soirée Eau citoyenne le 29 juin dernier, et aux 200 qui y étaient et qui voudraient en garder un souvenir. JT

Allô! Aaaaa lô! Aaaaa lôôôô! ... C'est ainsi que la soirée a commencé, animée par le poète d'ô devenu porteur d'eau, Raôul Duguay, filmée par Yves Langlois, aussi porteur d'eau. C'était la soirée Eau citoyenne, organisée par la coalition Eau Secours pour lancer officiellement la Fête de l'Eau du lac Champlain. L'église de Venise-en-Québec s'était transformée en salle de spectacle pour l'occasion. À l'entrée gratuite, des bouteilles d'eau sur glace à 1 $ pour faire oublier la canicule. À l'intérieur, 150? 200? personnes moins jeunes que plus, venues écouter trois de nos plus célèbres porteurs d'eau transmettre leur message à la baie Missisquoi : André Beauchamp, Jean Drouin et Jean-Claude Germain. Un message tellement simple qu'il faut se le répéter pour ne pas l'oublier : l'eau, c'est la vie, c'est notre vie; c'est donc notre affaire en tant qu'individus et citoyens.

André Beauchamp est théologien et consultant en environnement : il fut notamment président de la commission d'enquête sur la gestion de l'eau au Québec (1998-2000). Il a tout de suite mis la table en nous rappelant les grands enjeux humains liés à l'eau. La dimension juridique de l'eau : à qui appartient l'eau? La dimension internationale de l'eau : est-il normal que 9 % des pays se partagent 60 % de l'eau potable? est-il normal que la minorité gaspille et pollue l'eau dont elle dispose en abondance pendant que la majorité manque d'eau et souffre de la soif sur notre planète? La dimension citoyenne de l'eau : l'eau n'est plus une affaire de techniciens et de spécialistes; l'eau doit dorénavant être prise en charge par tous les citoyens; la politique de l'eau et la gestion des cours d'eau par bassin versant implique la participation de tous les citoyens à la protection de l'eau; cela prendra du temps, au moins une génération, et exigera beaucoup plus de moyens financiers que les fonds alloués jusqu'à maintenant; mais c'est bien parti, de plus en plus de gens prennent charge le présent et l'avenir de l'eau dans leur région, à preuve les 200 personnes présentes à cette soirée malgré la canicule et la période des vacances.

Tout de suite après, une surprise rafraîchissante : l'auteure-compositeure-interprète Soraya Benitez et sa voix sud-américaine accompagnée par les seules cordes de sa guitare sèche. Entre deux chansons aux accents espagnols, une intervention au micro : « Avant d'être accueillie au Québec, j'ai connu la faim et la soif dans mon pays argentin; je prête maintenant ma voix aux bonnes causes; quand on a connu le manque d'eau, on sait combien elle est importante; il faut protéger l'eau pour les générations qui nous suivront ». Une voix qu'on n'oublie pas malgré des sons d'une autre langue; certains mots qu'on peut facilement deviner cependant, gratia, gratia, gratia...

Le docteur Jean Drouin est du genre déroutant avec son concept de santé globale ou médecine préventive : il faut avoir confiance dans sa propre capacité de guérir, affirme-t-il. Plutôt que de réagir à la maladie, il faut agir sur les facteurs (et leurs interactions) qui peuvent améliorer ou maintenir notre santé : l'alimentation, le stress, le manque d'exercice, l'environnement, la spiritualité et le code génétique. Parmi eux, un facteur décisif, l'eau : notre corps étant fait à 70% d'eau, il faut en boire (au moins 1,5 litre d'eau par jour) et de la bonne. Il faut aussi bannir le plus possible l'usage des pesticides et des engrais : les pesticides qui causent une baisse de fertilité et des troubles d'apprentissage; les engrais dont les phosphates accroissent le phosphore dans les cours d'eau, ce qui amène la prolifération d'algues bleues ou cyanobactéries, qui causent des problèmes de foie et peuvent s'attaquer au système nerveux. Attention aux terrains de golf où les engrais sont particulièrement populaires, prend-il la peine de préciser. Aucune loi ne pourra changer quoi que ce soit à la situation; ce qu'il faut, c'est un changement de nos comportements alimentaires (alimentation plus 'biologique') qui, forcément, amèneront un changement dans les pratiques agricoles pour répondre à l'implacable loi de l'offre et de la demande.

Jean-Claude Germain, humaniste, historien et conteur est arrivé au plus chaud (au sens propre) de la soirée. Est-ce à cause de la chaleur? Toujours est-il que le conteur n'était pas très en verve; mais l'historien, si. Il nous a rappellé l'importance de la neige et de l'eau dans l'évolution du Québec depuis ses origines. C'est vrai que la vie avant nous était beaucoup plus accordée aux saisons, à l'abondance de la neige en hiver, aux tempêtes; que nos cours d'eau ont été d'une importance capitale dans l'implantation des paroisses, des villages et des villes; que nos poètes et nos écrivains ont célébré l'eau, le fleuve et nos rivières... Et qu'il faudrait retrouver ce respect de l'eau qui s'est perdu avec l'arrivée de l'industrialisation tous azimuts... (Une observation en dit long sur l'érudition de Jean-Claude Germain : en montrant la statue des Martyrs canadiens auxquels est dédiée l'église de Venise, il prend la peine de nous dire que même s'ils sont toujours représentés ensemble dans l'imagerie chrétienne, il y a peu de chances qu'ils se soient déjà rencontrés...)

En transition, avant de présenter chaque invité, Raôul Duguay est venu et revenu nous ramener à la réalité d'ici à travers son personnage de porteur d'eau passionné mais lucide : l'eau de la baie Missisquoi est polluée, c'est un triste fait; mais on n'est pas ici pour chercher des coupables, on est tous responsables dans le fond; ce qu'il faut, c'est travailler ensemble à solutionner le problème; pour y arriver, nous devons d'abord prendre conscience collectivement de la situation, nous devons nous mobiliser; ce soir, ce n'est qu'un début, la Fête de l'eau du lac Champlain, le 9 juillet, sera une journée privilégiée de mobilisation, il faut en faire un succès. (J'ai particulièrement apprécié cette trouvaille du poète d'ô : si jadis Noé nous a sauvé des eaux, selon la Bible, aujourd'hui c'est à nous de sauver les eaux pour nos descendants.)

À la sortie, sur le perron de l'église, le nouveau président de la Corporation bassin versant baie Missisquoi, Pierre Leduc, souligne le fait que cette soirée ayant eu lieu dans une église, lieu par excellence des rassemblements passés, cela a quelque chose de symbolique, peut-être même de prédestiné.

    De retour chez moi, au TéléJournal, un reportage saisissant sur la sécheresse qui sévit actuellement au Niger.


 

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